[Laure GAUTHREAU, LE WATER POLO DANS LA PEAU]

[Laure GAUTHREAU, LE WATER POLO DANS LA PEAU]

Plus grand palmarès du water-polo Français, la présidente du Grand Nancy Aquatique club évolue depuis plus de 45 ans dans ou autour des bassins. Rencontre avec cette passionnée posée et convaincue.

Un palmarès long comme le bras et sans équivalent dans l’hexagone. Laure Gauthreau n’a jamais fait étalage de son expérience mais préfère la capitaliser :  » Un jour, il sera battu et c’est logique. Moi, je suis surtout contente de construire et transmettre ce que j’ai pu apprendre « . Cette insatiable soif de reconnaissance de la discipline plus que de sa personne ont pourtant fait de Laure Gauthreau, au fil des années, une personnalité incontournable de son sport : d’abord dans le bassin avec les plus belles heures de l’équipe de France et aujourd’hui dans son club et les instances. Le water-polo dans la peau. Rencontre avec l’entraîneur et présidente du Grand Nancy Aquatique Club.

Son enfance parisienne

 » Je suis née dans le 9-3 comme on dit «  sourit Laure Gauthreau, aujourd’hui et plus que jamais nancéienne. Venue au monde le 22 mai 1969, c’est non loin du pavillon familiale, à Montreuil, où Laure Gauthreau a grandi, qu’elle allait ensuite découvrir l’univers aquatique :  » Il y avait un piscine à 100m de chez mes parents, c’est là que j’ai commencé à nager en maternelle et comme je me débrouillais bien à six-sept ans mes parents m’ont inscrite au club «  se remémore la poloïste, pas encore adepte du ballon. C’est dans la ligne d’eau, en brasseuse qu’elle évolue et participe pour la première fois à des championnats de France. Avec un maître-nageur, ancien international de water-polo, la jeune Laure alors âgée de 13 ans n’a pas tardé à être attirée par le sport collectif :  » On était une jeune bande de copines, on a monté notre équipe à Montreuil « …

Itinéraire de la « Professionnelle »

Montreuil est un essai, le Racing Paris, un tremplin. Au bout de quelques mois d’existence, la jeune équipe du 9-3 effectue un match amical dans l’antre du Racing Paris, alors champion de France. Là, à tout juste 15 ans, la jeune Laure Gauthreau ne passe pas inaperçue : « Après le match les dirigeants du Racing m’ont demandé si je n’étais pas intéressée pour venir chez eux. J’évoluais déjà en pointe (l’attaquant axial). Moi j’étais ravie mais il fallait en parler avec mes parents « . Car le rythme de la jeune Laure change alors de braquet : un nouveau lycée à Paris République et des entraînements à Montparnasse.  » Quand je sortais des cours, je regagnais la piscine, où il y avait un espace pour faire ses devoirs et je sortais de l’entraînement à 22h. Mes parents venaient me chercher « .

Intégrée à 15 ans en équipe de France, Laure Gauthreau commence à être un nom qui compte dans le water-polo et la jeune poloïste va alors choisir le chemin de la passion.

Alors que le milieu du water-polo féminin évolue pour le haut-niveau français, sans professionnalisme, avec des joueurs majoritairement fidèles au club, des joueuses installées professionnellement et dont l’éducation nationale était alors le principal employeur, Laure Gauthreau prend un autre chemin : celui du perfectionnement en multipliant les expériences en clubs. Un profil atypique pour l’époque qui lui vaudra le surnom de « la Professionnelle » :  » J’allais où le projet club me parlait. Après le Racing, j’ai pris la direction de Créteil et l’on finit second de la coupe d’Europe. Ensuite à 18 ans, je suis allée à Bordeaux, c’était le plus ancien club, il voulait grandir. Puis cap sur Tourcoing où j’ai été déçue. La culture polo était pour l’équipe garçon, les filles étaient reléguées aux seconds rôles. Ça ne m’a pas convenu, alors je suis partie pour l’ASPTT Nancy, club qui m’avait été conseillée par une coéquipière et amie de l’équipe de France, Yasmine Yahyaoui « 

Les années ASPTT Nancy, et la première historique pour un club français

Ici le projet club prend sens autour d’un passionné, ancien poloïste et homme de terrain, Christophe Bachelier. S’ensuit un premier titre de champion de France en 1994. En 14 ans, le club allait en décrocher 13… record à battre. Au fil des saisons, Laure Gauthreau passe alors du statut de star de l’équipe, à celui d’élément essentiel, puis de pilier incontournable et enfin de sage, avant de regagner les bords du bassin pour coacher… mais de manière alternative. En 2012, Laure Gauthreau alors coach, a toujours son nom coucher sur les feuilles de match et joue en pointe. De l’hégémonie de l’ASPTT Nancy, Laure Gauthreau garde en mémoire un match, celui de la campagne européenne de 2003, où l’ASPTT Nancy se hisse en demi-finale de coupe d’Europe des clubs champions et devient le premier club français à battre une équipe hollandaise…   

Partie pour rester

L’hégémonie de l’ASPTT Nancy sur le water-polo féminin n’est plus qu’un souvenir. Depuis son dernier titre national en 2008, le club est rentré dans le rang, devancé au fil des saisons par Lille, Nice ou Bordeaux… C’est en 2013, que Laure Gauthreau, toujours animée par cette indéfectible volonté de faire progresser sa discipline et plus spécifiquement, son équipe, décide de faire ses valises :  » Ce n’est pas parce qu’on a possédé que c’est acquis. Je ne sais pas pourquoi cela s’est doucement dégradé. Le fonctionnement n’allait pas dans mon sens, et je n’ai pas senti d’esprit de corps pour travailler notamment sur la formation. J’ai annoncé en février-mars 2012 que je partais en juin, sans a priori sur la suite. »

C’est pourtant un appel d’air qui s’effectue dans les rangs de l’ASPTT.  » Là j’ai dit aux filles. Ok, on peut faire un autre club, mais trouvez-moi douze filles. Avec les réseaux et les connaissances, c’était plus facile de rester dans le coin « . Acte accompli deux semaines plus tard. La natation synchronisée suit aussi le mouvement pour rejoindre la nouvelle entité du Grand Nancy Aquatique club née en 2013.  » Le concept n’est pas que compétitif, mais propose des sports aquatiques pour tous. On est parti de deux lignes d’eau à disposition pour aujourd’hui compter de vrais créneaux. Nous avons déjà atteint les objectifs qu’on s’était fixé pour 2023, notamment d’avoir des filles en équipe de France. Maintenant on vise le titre de champion de France d’ici trois/quatre ans « . 

Aujourd’hui

Rattachée à la piscine de Vandoeuvre en ETAPS (éducateur territorial), Laure Gauthreau est aujourd’hui engagée dans la féminisation du sport. A la fédération française de natation, elle vient d’être réélue au sein du comité directeur où elle est naturellement en charge de la commission water-polo.  » Ce n’est pas par ce que nous sommes quasiment à la parité en terme de licences au niveau fédéral que tout va bien. Quand j’étais sportive, je voyais des équipes étrangères avec des joueuses venues avec leurs bébés parce qu’elles ne pouvaient pas faire autrement. Je ne dis pas que c’est la meilleure solution, mais nous, qu’est ce qu’on propose ?  » Laure Gauthreau n’a pas fini de faire bouger son monde.

Source: Aymeric HUMBERT – L’EST REPUBLICAIN

Crédit Photo: JL – Ligue Grand Est